Formation : « Approche inclusive de la vie affective et sexuelle de la personne âgée »

Formation « approche inclusive de la vie affective et sexuelle de la personne âgée »

EHPAD « Notre Maison » Marseille

Mardi 8 et mercredi 9 novembre 2022, Aline et Stéphane sont allés à la rencontre des salariés de l’EHPAD « Notre Maison » de la Croix-Rouge française, situé à Marseille dans le 8ème arrondissement.

Aline, Stéphane et Elisabeth

Ces deux premières journées, co-animée par Elisabeth (formatrice en sexologie) et Stéphane, nous ont vraiment convaincu de la nécessité d’aborder tous ces sujets tabous, de donner des clés de compréhension et pouvoir enfin en parler sérieusement sans honte ou peur.

Aline est venue assister à la formation en tant observatrice car elle a envie de reprendre la casquette de formatrice (eh oui… elle a été formatrice quand elle était responsable d’unité dans la qualité en restauration rapide).

Aline est très émue en passant la porte d’entrée de l’EHPAD : « Je suis un peu le cœur bloqué, je suis émue, j’y entre en parlant bas, quel saut dans l’inconnu ! »

Aline observe et nous raconte :

« 9h approchent… Elisabeth et Stéphane se demandent combien seront les participant.e.s ? 3 ? 5 ? Et voilà qu’elles arrivent 1,2, 5,8, ….. 13 et un jeune homme. Génial !!! Mais elles restent coincées et timides. Oui… Certaines gardent même leur manteau, d’autres ont le polaire de la Croix Rouge.
Elisabeth met tout de suite à l’aise par des mots de bienvenue. Puis elle enlève sa veste et nous explique ce geste : Voilà, imaginez que ma veste soit le Jugement, Mon jugement sur vous et vous sur moi et bien je l’ENLEVE ! Acte symbolique mais si important. Oui je laisse mon jugement, laissez le vôtre et nous nous libérons ! CE QUI EST DIT ICI, RESTE ICI ! ».

Les 14 stagiaires (IDE, AS, ASH…) étaient dans l’attente, ils ne savaient pas vraiment ce qu’ils allaient découvrir lors de ces deux journées.

Aline :

« IDE , A S, ASH ? Ouh lala traduction svp… Ok. Il a une infirmière, des aides-soignantes, des serveuses en restauration et dans les chambres qui s’occupent des repas auprès des résidents, une ergothérapeute, une animatrice. Pratiquement toutes les personnes ont répondu : je ne sais pas ce que je vais trouver, j’attends de voir…
Ah lala… la sexualité des personnes âgées ? Qui y a pensé ? Vous, votre hiérarchie ? Euh non… pas vraiment disent-ils ? »

Le sujet est tellement tabou en EHPAD… Au début, certain.es n’osaient même pas utiliser le mot SEXUALITE… « On ne peut pas parler de ces choses-là… » « Est-ce que cela nous concerne ? », « non-dit / déni »… Alors comment imaginer pouvoir parler des parcours de vie des personnes LGBTI+ ou des personnes vivant avec le VIH, dont ils ignorent quasiment l’existence.

La première matinée a été consacrée aux représentations des participants sur la vie affective et la sexualité. Nous avons ensuite parlé sexualité à travers les références sociales, culturelles et religieuses, ce qui a permis aux stagiaires de comprendre qu’il existe trop souvent un grand décalage entre leurs représentations de la sexualité et celles des autres, notamment de celles de ceux qui la vivent.

 

Nous avons conclu la première matinée par plusieurs apports théoriques concernant les différentes composantes de la sexualité, nous avons ensuite posé les premières bases de l’identité sexuelle d’une personne pour aborder et comprendre les liens entre le désir sexuel, la fonction d’excitation sexuelle, la perception de sa féminité ou de sa masculinité et le sentiment amoureux. Nous avons même parlé d’érection du pénis ou du clitoris, de masturbation … et oui pas de tabou on aborde tous les sujets qui pourraient faire rougir !

Aline :

« Participation de plus en plus animée. Tout le monde se détend. Pose des questions. Donne son avis. »
« J’avoue que j’apprends beaucoup dans la partie plus théorique de l’anatomie intime de ces messieurs. Du commandement du cerveau, de la moelle épinière, de l’érection, l’éjaculation et donc aussi des maladies, des paralysies qui bloquent des fonctions liées à une sexualité « normale ». Paraplégie, Tétraplégie sont expliquées. »

L’après-midi a été consacrée à l’inclusion des personnes LGBTI+ et des personnes vivant avec le VIH. Nous avons commencé par questionner le sujet de l’inclusion, puis approfondi les composantes de l’identité pour mieux savoir de quoi on parle exactement et quels mots utiliser de manière appropriée.

Les composantes de l'identité
Les composantes de l’identité
Les témoignages vidéos
La sexualité

Une seconde partie a été consacrée aux réalités des personnes LGBTI+ (rappel de l’évolution des droits, caractéristiques de population, parcours de vie) de manière plutôt ludique. Nous nous sommes ensuite intéressés aux personnes vivant avec le VIH. Des témoignages vidéos de personnes concernées ont tous émus les participants. « Tous ces reportages, cela m’a fait de la peine pour eux. » « Je ne m’étais jamais posé ces questions… »

Une partie a été consacrée aux craintes exprimées par ces populations à l’idée de devoir aller en EHPAD. Tout cela bien sûr pour faire évoluer les pratiques professionnelles pour les rendre les plus inclusives.

Aline témoigne :

« Beaucoup d’interrogations quand Stéphane présente le module de notre formation spécifique aux personnes LGBTI+, aux personnes atteintes du VIH. Les vidéos des témoignages atteignent le public au cœur. Beaucoup de sentiments d’émotion seront exprimés. Et une reconnaissance du manque d’infos à ce sujet.
Quant à Stéphane et moi… Des paillettes se cacheront derrière nos paupières. »

La deuxième journée, les stagiaires ont travaillé sur des situations concrètes auxquelles ils ont été confrontés. Si le premier jour, ils n’auraient probablement pas pu en parler, ils ont partagés des exemples concrets qu’ils ont vécus et parfois seul, la peur au ventre sans pouvoir en parler. Ils ont décortiqué les situations pour mieux comprendre quels étaient les besoins, les risques des protagonistes de la situation vécue.

Aline nous relate :

« Une aide-soignante parle de l’exemple de la toilette intime chez une dame qui demandait qu’elle la frotte fort avec une serviette. Elle a refusé de le faire en disant : non Madame faite le vous-même.
Avec les messieurs, les aides-soignantes sont confrontées au problème de la masturbation. Des demandes gênantes qu’elles considèrent à juste titre comme des agressions. Une situation réelle est encore citée à ce propos. L’aide-soignante n’a pas osé en parler ni à sa hiérarchie ni à la famille, ni à ses collègues. De peur de perdre son emploi ! De passer pour celle qui fait des histoires…. »

A la fin de la deuxième journée, cette aide-soignante dira que maintenant elle aura le courage d’en parler. Ses collègues ont répondu de même et seront plus fortes ensembles.

Un rappel des droits fondamentaux des personnes âgées accueillis en établissement, de la loi sur le consentement ont permis de questionner cette tension entre « garantir la sécurité et la protection des personnes » et « respecter les droits des résidents » (avoir une vie privée, une sexualité, le droit à l’autonomie, le droit à la liberté sexuelle). Ce qui nous a amené à parler déontologie et éthique… et de conclure que chaque situation doit être appréhendée de manière unique, au cas par cas.

Aline questionne :

« Je soulève à ce propos le rôle de l’aidant.e sexuel.le. Rôle et pratique qui me questionnent. Elisabeth a déjà travaillé sur ce sujet encore tabou, avec l’association APPAS (Association pour promouvoir l’assistance sexuelle).
La ligne rouge étant la prostitution… »

Dernière partie de ces deux journées : identification d’actions concrètes à mettre en place dans l’établissement.

Stéphane exprime son ressenti :

« J’ai été vraiment impressionné, ému et très touché par le « grand écart » réalisé par les stagiaires entre le moment où ils sont arrivés et le plan d’actions d’une richesse inimaginable proposé en même pas 48h ! »
En tant qu’ancien directeur d’EHPAD, j’ai également retrouvé l’implication, l’envie de progresser et de comprendre pour améliorer ses pratiques professionnelles dans le but d’améliorer les conditions d’accueil de tous les résidents. Quel que soit le poste occupé dans l’EHPAD, toutes et tous ont vraiment démontré leur souci du prendre soin et de la bientraitance.
RESPECT !!! »

Une formation libératrice !

Tout le monde était souriant, force de proposition, libéré et heureux de pouvoir parler sans tabou.

Rendez-vous dans un mois avec les stagiaires pour aller plus loin sur les propositions d’actions concrètes imaginées pour pouvoir parler intimité, sexualité et diversité avec les autres professionnels, avec les résidents et les familles.

Aline :

« Cette formation a été tellement riche et émouvante, que j’ai eu l’idée de vous proposer deux apéros-débats : le premier le jeudi 15/12 à 18h30 portera sur le contenu de la formation et le retour des stagiaires et le second sur le sujet de l’aidant.e sexuel.le en présence d’Elisabeth le jeudi 19 janvier à 18h30. »
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